Pourquoi les fakes news ont-elles autant de succès ?




Quand vous faites une recherche Internet, est-ce que c'est pour approfondir un sujet que vous connaissez déjà ? Ou est-ce justement pour vous renseigner sur quelque chose dont vous n'avez aucune connaissance ? Pensez-vous que le fait de connaître un sujet vous immunise contre les fake news, que les plus vulnérables sont ceux qui ne s'y connaissent pas ? Eh bien, nous allons vous expliquer que ce n'est pas toujours le cas... 

Une étude a montré que même un public averti, ou du moins qui est censé avoir des connaissances sur un sujet, est influencé et pense que ce qu'il lit sur Internet est vrai. 

Trente-quatre lycéens en dernière année en science générale ont dû faire des recherches sur Google sur les bienfaits et les méfaits des vaccins. Pour chaque recherche, les auteurs ont gardé les vingt sites sur lesquels les étudiants avaient le plus cliqués. Seuls deux sites sur vingt partageaient de vraies informations sur les dangers des vaccins. En ce qui concerne les bienfaits des vaccins, seize sites sur vingt diffusaient de vraies informations. Lorsqu'on combine les deux recherches, plus de la moitié (55%) des quarante sites n'étaient pas fiables.

Pourcentage des sites relatant de fausses infos en fonction de trois niveau de recherche
Pourcentage des sites partageant de fausses infos en fonction des vingt, dix et trois premiers résultats d'une recherche Google.

Les auteurs expliquent qu'une étude a démontré que 80% des clics se faisaient sur les trois premiers liens d'une recherche Internet. Dans notre cas, 67% des sites n'étaient pas fiables.

On a ensuite demandé aux étudiants de répondre à un questionnaire sur les vaccins. 53% des étudiants ont donné de mauvaises informations à propos des vaccins. 

On peut donc voir que les étudiants ne se sont pas méfiés des informations qu'ils avaient pu lire sur Internet. D'ailleurs, 59% des étudiants étaient sûrs que tous les liens étaient fiables. 

Au vu de ces résultats, les chercheurs ont donc décidé de leur montrer une vidéo de 27 minutes à propos des vaccins. Cette vidéo venait du Centre d'éducation aux vaccins de l'hôpital pour enfants de Philadelphie. Les étudiants étaient ensuite invités à corriger leurs réponses précédentes. Suite à cela, 94% des étudiants ont donc donné de bonnes informations au sujet des vaccins. 

Pourquoi les fake news se diffusent-elles plus rapidement ?

A l'heure à laquelle il est difficile de s'imaginer vivre sans Facebook, Twitter ou, plus largement, le monde magique d'Internet, les fake news seraient beaucoup moins problématiques si elles ne se diffusaient pas aussi rapidement qu'aujourd'hui. En effet, une étude a montré que, sur le réseau social Twitter, les informations fausses se propagent plus vite et plus loin que les informations correctes. Une information correcte prendra six fois plus de temps qu'une information fausse pour atteindre 1500 personnes. Cependant, toutes les fake news ne se diffusent pas avec la même ampleur et rapidité : des fake news portant sur la politique ou sur une légende urbaine se propagent généralement bien plus que des fake news concernant la technologie ou les catastrophes naturelles. Essayons alors de comprendre le "succès" de ces fake news. 

Fonctionnement des réseaux sociaux & Google


Il faut bien avouer qu'aujourd'hui nous trouvons la majorité des informations dont nous avons besoin sur les réseaux sociaux ou, plus particulièrement, via Google. C'est tellement facile : il suffit de taper ce que l'on cherche pour avoir directement l'information. Finies les heures passées à lire d'épais ouvrages à la bibliothèque. Pourtant, cela ne nous apporte pas uniquement son lot d'avantage, le principe-même des réseaux sociaux ou de Google favorise la diffusion de fake news. Dans un prochain billet, nous parlerons plus particulièrement des réseaux sociaux.

Voici quatre explications susceptibles d'expliquer cette diffusion des fakes news dans les moteurs de recherche :

  • Parce que popularité ne veut pas dire fiabilité 
Sur les réseaux sociaux, plus une publication est commentée, likée et partagée, plus elle devient populaire et prolifère (voir ici). De plus, savez-vous que les premiers liens trouvés sur un moteur de recherche comme Google sont ceux pour lesquels il y a eu le plus de visites ? Comme présenté dans l'introduction de cet article, cela ne veut pas dire que les liens sont pertinents. En clair, cliquez sur un article, likez-le et vous contribuerez déjà à le rendre populaire. 
  • Parce que nous sommes tous capables de diffuser une information sur Internet 
Parmi les utilisateurs d'Internet, on trouve aussi des personnes mal intentionnées, qui cherchent à influencer les autres en leur montrant de fausses informations. Que ce soit pour tenter d'influencer les élections américaines ou pour augmenter leur "vues", leur "likes", ou faire le buzz, les personnes n'hésiteront pas à partager tout ce qui pourrait les aider à atteindre leur but, même si l'information est parfaitement fausse. A ceux-là, il faut aussi, malheureusement ajouter les personnes n'ayant pas forcément conscience des conséquences de leur "partage". Vous avez lu un article sympa du Gorafi et l'avez partagé ? Sachez que certains de vos amis n'ont pas détecté que le Gorafi était un site satirique, et ont cru votre article les yeux fermés.

  • Parce qu'il y a trop d'informations sur Internet 
Internet regorge d'un très grand nombre d'informations, cela a pour conséquence qu'il n'est pas toujours facile de vérifier une information précise. Pour cela, pensez à utiliser des sites tels que www.hoaxbuster.com ou www.snopes.com, qui sont spécialisés dans la vérification d'informations.
  • Parce que nous sommes victimes de la compétition entre les médias 
Face à une grande concurrence, il arrive que les médias soient tentés de diffuser du contenu erroné, mais au goût de leur public cible, afin de devancer leur concurrent. Ne fut-ce qu'en modifiant le titre de leurs articles, un message différent peut être compris ou déduit. Par exemple pour ce fait divers qui s'est passé à La Louvière au mois d'avril 2018.

Rtbf.be : "Un élève attaqué au couteau à l'Athénée provincial de La Louvière"
➜ On ne sait pas qui. Quelqu'un a-t-il pénétré dans l'école ? L'élève est-il blessé ? Juste menacé ?

Sudinfo.be : "Agression à l’Athénée de La Louvière : Ali a demandé plusieurs fois l’heure avant de poignarder Louis"
➜ circonstance atténuante ? Louis l'avait bien cherché ? Y-a-t-il une rivalité déjà présente entre les deux garçons ?

L'avenir.net : "Il poignarde son camarade de classe en plein cours"
➜ ils étaient amis et il l'a poignardé ? Circonstance aggravante ?

Et si nos émotions y étaient aussi pour quelque chose ?

Résultat de recherche d'images pour "émotion vice versa"
©Disney
Une étude a montré que les fake news et les informations correctes ne sont pas associées aux mêmes émotions. Les billets retweetant de fausses informations contenaient plutôt des termes associés à la surprise et au dégout, alors que, pour les vraies informations, les termes utilisés rappelaient plutôt la tristesse, l'anticipation, la joie et la confiance. Même s'il n'a pas été démontré que l'originalité d'une information soit la cause de sa diffusion, les auteurs ont également observé que les informations fausses sont plus originales que les informations correctes, et que les informations originales sont plus souvent retweetées. Conclusion, la prochaine fois que vous êtes surpris ou dégouté par un article, méfiez-vous ! 

Des explications qui n'en sont pas

Par ailleurs si vous vous êtes déjà intéressés à ce phénomène de fake news, sachez qu'il existe sur Internet des explications qui n'en sont pas vraiment : 
  • Une hypothèse était que les utilisateurs de Twitter diffusant des fake news avaient plus de "followers" ou étaient plus actifs que les utilisateurs de Twitter qui n'en diffusaient pas. En réalité, c'est l'inverse ! Ces utilisateurs-là sont moins suivis et moins actifs que les autres (voir ici).
  • Les "Bots", des robots faisant office d'utilisateurs fictifs, ont également été suspectés de favoriser la diffusion de fake news. Pourtant, ces robots augmentent simplement la diffusion d'informations de manière générale, sans favoritisme pour les informations incorrectes (voir ici). 
En conclusion, les fake news se diffusent très vite, et cela est en partie dû au comportement des utilisateurs des réseaux sociaux. N'hésitez donc pas à vérifier vos sources avant de partager votre prochain article !

Delcuve Zoé, Dupriez Céline, Gonin Clara

Références

Klein, O. (2018). "Fake News" et crédulité : que peut-on faire ? Piste d'analyse et d'intervention sur base de la recherche en psychologie sociale. Document non publié, Université Libre de Bruxelles, Bruxelles.

Kortum, P., Edwards, C., & Richards-Kortum, R. (2008). The impact of inaccurate Internet health information in a secondary school learning environment. Journal of medical Internet research, 10(2).

Mocanu, D., Rossi, L., Zhang, Q., Karsai, M., & Quattrociocchi, W. (2015). Collective attention in the age of (mis) information. Computers in Human Behavior, 51, 1198-1204. 

Vosoughi, S., Roy, D., & Aral, S. (2018). The spread of true and false news online. Science, 359(6380), 1146-1151. 

https://agency-inside.com/2016/06/reseaux-sociaux-definition-webmarketing/ 

https://savanturiersducerveau.wordpress.com/2016/05/01/les-emotions-vice-versa/

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